Par Turham Ravensoar, Eclaireur de la Loge de Magnimar
RAPPORT TH-561-063
Voila trois heures que je suis au chevet de la malheureuse Astal, dans la sécurité du temple de Desna. La maladie avait commencé à souiller ses chairs et quelques touffes de cheveux parsèment l'oreiller. Le sort de guérison des maladies que j'ai lancé a stoppé l'évolution des effets. Patiemment je prie, change les bandages enduits d'onguents et pratique les offrandes purificatrices.
La petite délire beaucoup au milieu de la nuit. Son corps s'agite de spasmes tandis qu'elle semble revivre la journée dans son sommeil fiévreux. Je note des bribes de son récit.
"... Le silence lourd après la bataille contre ces deux aberrations - des êtres difformes aux longs bras griffus. Puis les plaisanteries de Mad pour chasser la peur de nos cœurs. Ça me fait du bien. Dans quel lieu maudit avons-nous pénétré ? Quelles autres horreurs sans nom cet édifice renferme-t-il ?
Mad verrouille la porte de l’ancienne prison pour couvrir nos arrières et Arannis lance un sort de lumière sur son bouclier. Plus pratique qu’une torche mais pas très discret. Enfin, je discerne mieux les objets qui occupent la salle.
On reprend l'exploration. Mad passe devant en éclaireur puisqu'il est seul à voir dans le noir. Fait des allers-retours pour nous informer. Oh, ça prend beaucoup de temps, on n’avance pas vite mais c’est plus sûr comme ça.
La salle suivante est remplie d'instruments de torture. Une table, des chaines, des cages… Je prends une pince et la mets dans mon sac à dos, on ne sait jamais… Mad m'appelle, il a trouvé quelque chose dans la pièce contigüe. Il y a des étoiles à sept branches sur les murs, des débris de bois, du papier sur le sol. "Astal, regarde ça!", il dit… J'observe le parchemin intact et …. Ohhhhhhhh…. une douleur atroce me transperce l'épaule. Je m'effondre… J'aperçois le visage grimaçant d’un gobelin massif avec… trois bras armés, je crois... La suite, confuse. Mad attaque et Smellkalf surgit en brandissant son épée à deux mains. Le gobelin ne fait pas long feu… Fini de grimacer ! Je reprends mes esprits par les soins de ce bon Arannis.
Le gobelin difforme… Est-ce le résultat d’une malédiction qui plane ici ? Faut pas trainer… Nous prenons ses armes avant de poursuivre dans les couloirs. Un escalier descend vers une grand salle. Des cris rauques dans le noir, des raclements et une odeur de charognes qui nous tétanise. Mad descend malgré tout. Brave Mad ! Il voit une douzaine de plaques de bois partout sur le sol. Ni une, ni deux, je lance un sort d'illusion et crée une nuée de chauve-souris pour faire diversion. Aïe, Mad est surpris et son pied tape dans une planche. Les cris redoublent mais les horreurs qui sont dans une fosse en dessous ne surgissent pas. Ouf ! Mais c’est raté pour la discrétion... Nous avançons dans la salle. Le halo de lumière provoque un déchainement de cris furieux. Des bêtes affamées… Effrayantes… Faut pas soulever les trappes, pas libérer les créatures… Mais je ne supporte pas de laisser cette menace derrière nous. Faudrait exterminer tous ces morts-vivants qui attendent là-dessous. Les autres ne veulent pas, trop dangereux… Smellkalf dit que les gardes le feront. Je m’incline à contre-cœur.
On quitte la salle des trappes pour avancer dans le couloir suivant. Il s'ouvre à gauche sur un escalier en pierre qui descend vers les profondeurs… Obstrué par des éboulis, tant mieux. Le couloir continue tout droit et se termine sur une salle… Ouah… Incroyable… De la magie brute… Une salle sphérique de 6 mètres de large, les murs métalliques noirs avec des écritures comme à celles présentes sur la statue rouge, qui apparaissent comme des éclairs rouges puis s'effacent, et réapparaissent plus loin... Inscriptions qui pulsent et se répètent comme des mots ou des phrases… Je les note… Au milieu de la salle, des objets improbables qui flottent : une baguette, une bouteille de vin, un livre ancien, un parchemin, un corbeau entouré de vers grouillants... On n'ose pas entrer dans la salle alors j'invoque "Manipulation d'objets" pour les récupérer un à un. Le livre est dans une langue inconnue mais la tête de chacal sur la couverture et les images… d'une rare violence à l'intérieur… Pas de doute sur l'objet du livre : la déesse Mère des monstres, Lamashtu ! (Arannis a une nouvelle attaque psychique, le pauvre !). Nous récupérons tout, même le corbeau mort que j'emballe dans un tissu avant de le mettre dans mon sac, on ne sait jamais ! (ah, je vois bien que les autres se moquent, mais tout cela servira un jour !)
On rebrousse chemin. Je traine dans la salle des trappes… éradiquer les morts-vivants… mais les autres continuent d'avancer, alors j'accélère. Retour devant la statue, ou ce qu’il en reste… On prend les grands escaliers qui montent. Mad ouvre délicatement la porte. Il y a une petite pièce ronde avec au centre, un bassin bordé de crânes. De l'eau claire dedans. Pas normal, non, pas normal de l’eau claire dans un lieu abandonné depuis... ben, depuis très longtemps ! Je le suis dans la salle, et encore une fois, je suis attaquée par une monstruosité !!!! Une énorme tête de 50 ou 60 cm de long, toute noire avec des dents pointues, et bordée d'ailes tombe du plafond… Attention ! Mad l’évite mais pas moi… Saleté ! Ses ailes battent autour de ma tête. Je me fais mordre et pousse un grand cri. Bis repetita, Smellkalf et Arannis se précipitent. Je me replie dans le couloir. J'entends cette horreur lancer un cri perçant … Mad et Arannis, paralysés ! Y a que Smellkalf pour se battre. Oh non, il se fait mordre... mais non, il tient bon et tranche la tête en deux. Bon sang de bon sang de bon sang, pourquoi suis-je la cible de ces créatures dégénérées ? Nous explorons la salle. Rien de spécial en dehors des crânes et du bassin. Je prélève de l'eau claire dans ma fiole de soins vide (on ne sait jamais)… On continue à suivre le couloir jusqu’à un escalier - qui monte celui-là, mais tout aussi bouché que l'autre. Tant mieux... Retour à la case départ, la statue rouge, une nouvelle fois...
On prend donc le troisième et dernier couloir non exploré... Il s'élargit rapidement sur un petit autel en pierre dressé sur une estrade de 2-3 marches. Et l'autel est dédié à .... Talaaam … Lamashtu ! Du moins si on en croit la tête de chacal gravée dans le mur au-dessus du petit bassin en marbre noir. En obsidienne ? Oui, peut-être aussi. Cette fois, l'eau du bassin est croupie et personne n'en prélève une goutte... Mad passe un temps fou à chercher des passages secrets. Evidemment, il n’y en a pas…
L'autel est à proximité d'une grande double-porte. Je crois que nous touchons au but ! on est hyper tendus. A travers la porte, on entend faiblement une voix qui chante une mélopée dans une langue indéfinissable. Une voix comme celle d'un enfant chantant une comptine. Arannis soupçonne un sortilège et nous invite à nous boucher les oreilles avec des lambeaux de MA ( ?!) couverture. Evidemment, la communication entre nous devient délicate. Déjà qu'on n'y voit pas grand-chose ! Ça devient un peu la Cour des miracles, cette équipe ! Mad et SmellKalf entrouvrent la porte discrètement. Mad jette un oeil et détecte une grande salle. Malheureusement Arannis s'approche avec son bouclier lumineux, nous ôtant toute chance de surprendre ce qui se trouve à l'intérieur. On s’engouffre dans la grande salle. J’ai l’impression d’entrer dans une cathédrale ténébreuse, silencieuse et glaciale. Le bouclier d’Arannis éclaire près de nous un grand bassin circulaire avec en son centre, un cercle de crânes plantés sur des pieux. Plus loin, en hauteur, on voit ou devine un bassin en forme de triangle qui émet une lumière orange. Une petite créature démoniaque se tient en bordure du triangle.La fameuse quasit !
S’ensuit un combat difficile dans le noir contre le monstre étrange, puis contre la quasit qui réapparait pour nous lancer des sorts. Je me bats parfois à l’arc, parfois à la rapière. On est gênés par l’absence de lumière et le manque de communication. Mais je crois que les bouchons d’oreille ont quand même leur utilité contre la magie du démon. Smellkalf se révèle encore une fois le plus efficace. Je me sens en sécurité avec lui à mes côtés. Au bout d’un moment, Mad quitte le combat et prend l’initiative de détruire le bassin orange avec son pied de biche. Je trouve ça tellement dérisoire ! Mais Arannis finit par l’aider et les pierres qui bordent le bassin bougent. Cela semble affoler la quasit. Profitant de la voir dans la lumière du bassin, j’encoche une flèche pour abattre le monstre. Le temps ralentit. J’inspire. Mon esprit se tait. Seul le battement calme de mon cœur résonne dans mon corps. J’expire. Crève, démon ! Mes doigts lâchent la corde et la flèche part. Elle transperce la tête de la quasit qui s’effondre. Les autres me regardent ébahis. Quoi, est-ce si improbable que ça que je sois utile en combat ?
Mad et Arannis finissent de desceller les pierres du bassin. Le liquide orange comme de la lave froide se répand sur l’estrade puis en contre-bas. Au moins personne ne viendra engendrer de nouvelles aberrations ici ! Pendant que les autres se répartissent le butin, je regarde les inscriptions gravées un peu partout sur les murs. Toujours cette langue ancienne du Thassilon… Je pense au sage Quink et à son hypothèse sur les soubassements du Phare. Fichtre, ils sont là ! Nous les avons découverts ! J'espère que l'émotion ne sera pas trop vive pour le vieil homme ! J'ai pris soin de dessiner le plan de l'édifice. Je suis certaine qu'il sera utile à la garde ou au sage.
Je me sens lasse de toutes ces tensions mais par la déesse des Arts, quelle journée incroyable !
...
Aux premières heures de la journée, quand la lune redescend sur l'horizon, nous avons vu les joues de la demie-Elfe reprendre leurs couleurs. La fièvre est tombée et le souffle calme. Que Desna soit louée dans sa grande bienveillance, la transformation en vargouille n'aura pas lieu ! Bien que ce monstre vienne d'un monde inférieur, il est heureusement assez faible pour je puisse guérir ses effets. Je me demande qui a pu invoquer cette créature du Mal.... Et pourquoi ?
Abstalar Zantus, Grand-Prêtre de Pointesable